Par deux décisions rendues le même jour au sortir des vacances d’été 2022, la Cour de cassation étend considérablement la protection du droit de la consommation aux professionnels.
Rappelons en effet rapidement que, sauf exception, le droit de la consommation codifié dans le code de la consommation a vocation essentiellement à protéger les droits des consommateurs, c’est-à-dire des personnes ayant agi à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de leur activité professionnelle.
A l’inverse, les professionnels (pour la plupart commerçants ou artisans), ne sont pas protégés par le code de la consommation, lequel dresse au contraire à leur encontre une liste d’obligations à respecter dans le cadre de leurs relations qu’ils entretiennent avec leurs clients consommateurs.
Mais il existe des exceptions que la Cour de cassation vient précisément de rappeler, car elles ne vont pas vraiment de soi…
Dans la première affaire, un neurologue inscrit à un congrès médical avait réservé une chambre dans un hôtel pour participer à ce congrès.
Hospitalisé avant le début du congrès, il avait donc annulé sa réservation et avait cherché vainement à se faire rembourser par l’hôtel en question.
Pour rejeter sa demande de remboursement du prix de la réservation, le tribunal judiciaire de BORDEAUX avait expliqué qu’en sa qualité de neurologue participant à un congrès médical, il avait agi en sa qualité de professionnel et non de consommateur en réservant une chambre à l’hôtel, de sorte qu’il ne pouvait pas prétendre à la législation relative aux clauses abusives, exclue pour les professionnels.
Le tribunal estimait en effet qu’il existait un lien direct entre la participation du neurologue au congrès médical et la réservation d’hôtel.
Le tribunal est toutefois désavoué par la Cour de cassation, laquelle considère au contraire « qu’en souscrivant le contrat d’hébergement litigieux, M. [I] n’agissait pas à des fins entrant dans le cadre de son activité professionnelle ».
Dans la seconde affaire, à l’occasion d’un démarchage, une société d’expertise comptable avait conclu un contrat de location d’un photocopieur, financé par société de leasing.
A ce stade, il convient de rappeler que, selon le code de la consommation, les dispositions relatives aux contrats conclus hors établissement (nouvelle dénomination du démarchage à domicile) s’appliquent « aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l’objet de ces contrats n’entre pas dans le champ de l’activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq ».
La société d’expertise comptable avait fait valoir qu’elle bénéficiait de ces dispositions protectrices relatives au démarchage, et elle s’était rétractée du contrat conclu.
Le financeur ne l’entendait pas ainsi et lui réclamait le paiement de toutes les sommes restant dues en vertu du contrat.
La cour d’appel avait alors rejeté l’argumentaire de la société d’expertise comptable, considérant que celle-ci disposait de toutes les compétences professionnelles pour apprécier les conditions financières d’un contrat de location portant sur un photocopieur, matériel de bureau indispensable à son activité principale, de sorte qu’elle ne pouvait bénéficier des dispositions protectrices du code de la consommation et du droit de rétractation prévu par ce code.
La cour d’appel est toutefois là encore censurée par la Cour de cassation, laquelle lui reproche le fait de n’avoir pas établi « que les contrats de location entraient dans le champ de l’activité principale de la société » d’expertise comptable.
A bon entendeur…
Gilles HAMADACHE