C’est une décision de la Cour de cassation qui ne passera pas inaperçue chez les assureurs et les défenseurs des assurés consommateurs: le 14 octobre 2021, la plus haute cour a reproché à la cour d’appel de PARIS de ne pas avoir recherché si une clause figurant dans un contrat collectif d’assurance sur la vie proposé par la société LA MONDIALE PARTENAIRE (l’assureur), aux termes de laquelle le montant de la rente à verser à l’assuré sera fixé « au tarif en vigueur », n’était pas abusive.
Mais pour une meilleure compréhension de l’affaire, un petit rappel s’impose: en matière d’assurance sur la vie, nombreux sont les contrats qui prévoient que le capital constitué au fil des années par les versements de l’assuré sera reversé, au terme dudit contrat, sous forme de rente.
Or, le cabinet de Maître Gilles HAMADACHE ne compte plus les assurés consommateurs qui se sont plaints du montant dérisoire de la rente proposée par l’assureur à l’échéance du contrat.
La Cour de cassation ne s’était jamais, jusqu’alors, penchée sur cette question: c’est précisément ce qu’elle vient de faire le 14 octobre dernier.
Un assuré ayant conclu un contrat d’assurance sur la vie se plaignait du fait que la rente annuelle susceptible de lui être versée par l’assureur avait baissée car l’assureur avait fait application, pour le calcul de ladite rente, d’une table dite « unisexe » de conversion du capital en rente, dont l’assuré estimait qu’elle lui était inopposable, et que seule devait s’appliquer la table de rente différentiée TGH05 qui lui était plus favorable.
La cour d’appel de PARIS avait débouté l’assuré de sa demande.
Pour casser cette décision, la Cour de cassation procède par deux étapes:
D’une part, elle se saisit d’elle-même de la possibilité qui est la sienne d’examiner d’office le caractère abusif d’une clause contractuelle, alors qu’aucune des parties en l’espèce ne le lui demandait. Sur ce point toutefois, la jurisprudence de la Cour de cassation est constante, et se fonde en particulier sur un arrêt de la Cour de justice de l’Union Européenne de 2009.
Mais d’autre part, et c’est là l’apport le plus important de l’arrêt de la Cour de cassation, celle-ci reproche à la cour d’appel de ne pas avoir recherché si la clause du contrat d’assurance litigieux, qui ne permettait pas, pour l’assuré, de calculer de manière précise, dès la souscription du contrat, le montant de la rente qui lui sera versée, n’était pas abusive.
En l’espèce, la clause en question du contrat d’assurance stipulait que « l’épargne constituée à la date de la transformation en rente détermine le capital constitutif de la rente, le montant de la rente est alors calculé selon le tarif en vigueur à la date de la transformation en rente et les options choisies au titre des garanties proposées ».
La Cour de cassation constate que cette clause renvoie « sans autre précision, au « tarif en vigueur » », et reproche à la cour d’appel de PARIS de ne pas avoir recherché « si cette clause « était rédigée de façon claire et compréhensible et permettait à l’adhérent d’évaluer, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques et financières qui en découlaient pour lui et, dans le cas contraire, si elle n’avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du non-professionnel ou consommateur ».
Cette décision devrait constituer un véritable tsunami dans le monde de l’assurance, tant les contrats d’assurance prévoyant la transformation d’un capital en rente sur la base de calculs particulièrement flous sont nombreux!
Il était donc temps que la Cour de cassation se prononce sur cette question et tranche en faveur du consommateur, ce qu’elle vient de faire.
Et c’est heureux.