Les confinements ont été l’occasion pour les français de réaliser – ou de faire réaliser des travaux – à leur domicile qu’ils n’avaient pas prévus initialement, ou du moins pas aussi rapidement.
Ce surcroît de marchés de travaux conclus avec des artisans a malheureusement également induit son lot d’incompétences, de manques de professionnalisme, et même d’arnaques.
L’occasion donc, en quelques lignes, de revenir sur une décision très récente de la Cour de cassation portant sur la preuve de travaux supplémentaires dont la commande est contestée par le client (que l’on appelle le maître de l’ouvrage).
Lorsqu’un vendeur vend une chose à un acheteur, et lui en réclame le prix, la preuve de l’existence du contrat de vente doit être absolument rapportée par la production d’un écrit (c’est-à-dire d’un contrat de vente écrit) si le prix excède un certain montant (en l’occurrence 1.500 euros).
Si le vendeur est dans l’incapacité de présenter au juge un contrat de vente signé par l’acheteur, alors il ne pourra obtenir la condamnation de ce dernier à lui payer le prix de vente, faute d’avoir pu rapporter la preuve du contrat.
Pendant très longtemps, la jurisprudence n’était pas très claire sur l’application de cette règle des 1.500 euros aux contrats dits « d’entreprise », incluant les contrats ayant pour objet des travaux réalisés par un artisan.
Mais ce 17 novembre 2021, la Cour de cassation a tranché via une décision on ne peut plus claire.
Une société avait réalisé des travaux pour son client particulier, et lui réclamait la somme de 14.000 euros de travaux supplémentaires par rapport au devis signé, travaux que le client contestait avoir commandés.
La difficulté résidait dans le fait que la société en question était dans l’incapacité de communiquer au tribunal une commande écrite de ces travaux, signée par le client.
La société contestait l’application à ces travaux supplémentaires de la règle selon laquelle, au-delà de 1.500 euros, un écrit est obligatoire.
La Cour de cassation ne lui a toutefois pas donné raison: faute de production d’un écrit signé par le client, la preuve de la commande desdits travaux n’est pas rapportée.
Si cette décision s’inscrit dans la droite ligne d’une jurisprudence aussi constante que sévère à l’égard des artisans, et qui exige la preuve irréfutable du consentement du client sur les travaux réalisés (qu’ils soient, du reste, l’objet du devis initial, ou qu’il s’agisse de travaux supplémentaires), cette même jurisprudence était en revanche auparavant plus « flexible » dans l’adminission de la preuve de ce consentement.
Désormais, pas d’écrit = pas de commande, sauf si l’artisan parvient à produire un commencement de preuve par écrit, autrement dit un écrit autre qu’un contrat signé en bonne et due forme, comme par exemple un e-mail, un SMS, ou un courrier émanant du maître de l’ouvrage (article 1362 du Code civil).
Mais ce commencement de preuve par écrit doit être complété par une autre preuve (un témoignage par exemple), ce qui n’est évidemment pas sans compliquer la tâche de l’artisan en quête de son paiement.