Délai de prescription et assurance : de bonnes nouvelles pour les assurés !

Ce qui était le cauchemar des assurés risque depuis quelques mois de devenir celui des assureurs…

Pour rappel en effet, sans doute aux termes d’un lobbying intense des assureurs, ceux-ci sont parvenus à bénéficier d’un délai de prescription de deux ans s’agissant des actions en paiement d’indemnités d’assurance initiées par leurs assurés, ce délai étant beaucoup plus court que le délai de prescription de droit commun qui est de cinq ans.

Pour rappel encore, le délai de prescription est le délai au-delà duquel un justiciable ne peut plus agir en justice contre un autre justiciable.

En matière d’assurances donc, les assurés disposent seulement d’un délai de deux ans, contre cinq normalement, pour assigner le cas échéant leur assureur devant les tribunaux en paiement d’indemnités d’assurance. Ce délai de deux ans peut paraître long, mais en pratique il est très court, surtout lorsque l’on sait que certains assureurs n’hésitent pas à jouer la montre avec leurs assurés précisément pour que la prescription soit acquise.

Afin de contrer la brièveté de ce délai, la Cour de cassation juge certes depuis longtemps que, si l’assureur ne mentionne pas dans le contrat d’assurance que le délai de prescription n’est que de deux ans au lieu de cinq, comme cela lui est imposé par l’article R. 112-1 du Code des assurances, alors ce délai de deux ans ne s’applique pas.

Mais par deux arrêts, l’un du 24 novembre 2022, l’autre du 19 janvier 2023, la Cour de cassation enfonce incontestablement le clou, et rétablit l’équilibre au profit des assurés dans leurs litiges contre leurs assureurs.

Dans son premier arrêt, elle juge en effet qu’à défaut de mention du délai de prescription de deux ans dans le contrat d’assurance, non seulement ce délai ne s’applique pas, mais le délai de prescription de droit commun de cinq ans non plus !

Autrement dit, si vous saisissez le juge contre votre assureur au bout de dix ans et que vous parvenez à démontrer n’avoir pas été informé que le délai de prescription en matière d’assurance n’était que de deux ans, alors votre action ne sera pas jugée prescrite.

Dans l’affaire objet de la seconde décision de la Cour de cassation, une assurée se plaignait de ne pas avoir été correctement informée par son assureur du fait que son contrat d’assurance-vie ne garantissait pas le montant du capital versé.

L’assureur avait soulevé la prescription (en l’espèce de cinq ans s’agissant d’une action en responsabilité et non d’une demande de versement d’une indemnité d’assurance) de la demande en justice formée en 2015, alors que le contrat avait été souscrit en 2007 et que, par la suite et chaque année, l’assureur avait envoyé à son assurée une lettre d’information (relevé de situation) qui lui permettait de se rendre compte de l’érosion de son capital. L’assureur communiquait à la juridiction copie de ces lettres d’information, et considérait donc que le délai de prescription de cinq ans avait commencé à courir dès la réception par l’assurée de la première lettre d’information faisant état d’une perte en capital.

Pour contrer l’argument de l’assureur, l’assurée contestait avoir reçu les lettres d’information en question.

La Cour de cassation suit en l’espèce l’argumentaire de l’assurée et juge que « la seule production par l’assureur, sur lequel pèse la charge de la preuve du point de départ du délai de prescription qu’il invoque, de la copie de la lettre d’information annuelle, ne suffit pas à justifier de son envoi au souscripteur d’une assurance sur la vie qui conteste l’avoir reçue ».

Sachant qu’en pratique les bulletins annuels de situation sont toujours envoyés en lettre simple et non en lettre recommandée, cette décision de justice devrait permettre aux assurés de ne jamais voir leurs demandes prescrites s’ils souhaitent engager une action en responsabilité contre leurs assureurs en matière d’assurance-vie.

Souhaitons que la Cour de cassation poursuive dans cette voie.

Gilles HAMADACHE

Avocat Généraliste

Le cabinet de Maître Gilles HAMADACHE est un cabinet d'avocat généraliste basé à AGEN dans le sud-ouest. Maître HAMADACHE saura vous apporter toute son expertise et son savoir faire dans la défense de vos intérêts contre toute sorte de professionnels (banques, organismes de crédits, assurances, artisans...). A côté du droit de la consommation, de la responsabilité civile et des contrats, Maître HAMADACHE développe également une activité de conseil aux entreprises étrangères (en particulier allemandes) qui émettent le souhait de s'implanter en FRANCE.

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